Le 24 septembre 911, les principaux seigneurs allemands offraient la couronne de Germanie à l’un des leurs, Conrad de Franconie. Un acte fondateur qui marque la naissance de l’Allemagne. Car ce faisant, ils rompent définitivement avec la dynastie carolingienne issue de Charlemagne, qui régnait des deux côtés du Rhin, sur la France, la Belgique et l’Allemagne actuelles. L’élection de Conrad Ier met un terme à dix ans de conflits successoraux inaugurés par la mort d’Arnoul de Carinthie. Il descendait de Charlemagne, mais son rang de naissance ne lui conférait aucun droit légitime à une couronne et lui valait de fortes oppositions à l’intérieur même de ses terres. Il y remédie à la veille de sa mort, en 901, en transmettant la couronne de Germanie à Louis IV L’Enfant, le représentant légitime des Carolingiens.
Mais quand meurt à son tour Louis IV L’Enfant, dix ans plus tard, les seigneurs allemands ne veulent plus avoir affaire aux piètres descendants du grand empereur et refusent de reconnaître pour roi son héritier légitime, Charles III Le Simple. C’est ainsi qu’ils s’unissent autour de Conrad de Franconie. En 918, sur son lit de mort, Conrad Ier désignera pour successeur le duc Henri de Saxe, dit l’Oiseleur. Le fils de ce dernier, Otton, réunit l’Allemagne et l’Italie en son pouvoir et fonde le Saint empire romain. Deux générations plus tard, à Paris, les seigneurs de Francie occidentale portent Hugues Capet à la royauté. Ses descendants vont régner sans discontinuer sur le pays jusqu’en 1792.
Avec Hugues Capet, c’est la fin du Regnum francorum, le royaume des Francs fondé par Clovis quatre siècles plus tôt et relancé par Charlemagne, et son immense prestige. Le pape Grégoire Ier écrivit ainsi à Childebert II, roi des Francs d’Austrasie: « Autant la dignité royale élève au-dessus des autres hommes, autant votre dignité royale franque vous élève au-dessus des royautés des autres nations ». À sa place émergent deux ensembles nationaux promis à un grand avenir, la France et l’Allemagne, l’un enclin à incarner la marche en avant du monde, et l’autre qui, meurtri par l’histoire, œuvre à son propre effacement du concert des nations.
Mille cent et dix années ont passé, et, en cette fin de semaine, le destin de Parties Civiles n’avait point basculé. Son président débonnaire continuait un règne paisible sous le regard attendri de ses administrés. L’Assemblée générale n’avait pas bronché, le reconduisant sans barguigner pour un nouveau mandat, tandis que l’Allemagne peinait à se choisir un nouveau guide. Les statuts, comme la constitution allemande, n’imposent pas de limite. Seule l’usure du temps ronge les âmes des gardiens du temple.
Table 1, dite « A l’allemande » : La couronne d’Emara est un jeu qui tourne très bien, très Allemand (Pegasus Spiel). Pas de surprise à l’horizon mais une mécanique bien huilée, froide et avec peu d’interaction. A chaque tour, des événements aléatoires ont lieu. Ces événements ainsi que le jeu de la carte apportent une part d’aléatoire qui peut déranger mais qui s’intègre bien dans le jeu et qui lui apporte une certaine saveur. Ses protagonistes incarnent des prétendants au trône du roi Theodorius, qui se fait vieux et cherche un successeur. Il s’agit de démontrer que vous êtes le meilleur à développer le royaume en augmentant la population tout en offrant un toit à chaque citoyen. Un jeu pas si facile à appréhender et à planifier, et c’est Tristan, venu pour l’occasion, qui le dit et finit dernier ex-aequo ! Adriane a déjoué ses plans, dominant également, façon rouleau compresseur, Olive pour son grand retour, et Samuel !
Table 2, dite « Blitz Frieden » : à cette table, Frank propose deux jeux pas trop longs et coopératifs, visant une paix éclair. François le jeune, un jeune adhérent qui rejoint nos tables, en est, tout comme Guillaume et Anthony, qui lui aussi fait son grand retour. Ils furent victorieux à Top ten mais échouèrent à Deckscape.
Table 3, dite « Trois couleurs mais lesquelles » : Des élections allemandes, il est attendu une coalition à trois couleurs, reste à savoir lesquelles. A Everdell, ce n’est pas les couleurs qui manquent à la forêt et ses petits peuples. Les candidats de la soirée sont Paul, Yona, Christophe et Dom. Le premier, connaissant bien le jeu et ses combos, part favori et fait couiner Dom dès le début en achetant avant lui la paire de cartes qu’il convoitait. Le jeu est intéressant par le rythme autonome de chaque joueur qui franchit les saisons. Dom, à contretemps, finit bien avant les autres sans avoir trop profité des bonus de fin de saison. Les 3 autres prennent le temps d’optimiser leurs constructions, Paul et Christophe finissant avec un tas de ressources impressionnant et étant les seuls à atteindre la limite de 15 cartes dans leur village. Mais c’est le novice, profitant en particulier des couples Husband/Wife des autres joueurs, qui finit en tête avec 68 PV contre 63 à Paul. Dom (45) et Yona (35) ne peuvent que promettre qu’ils feront mieux la prochaine fois. Leçon pour ce soir : démarrer par des bâtiments de production permet à la fois de les utiliser plusieurs fois et de récupérer gratuitement la bestiole associée.
Table 4, dite « Mission sacrée » : à la table de Fuji Koro, on vit une aventure a l’intérieur du mont Fuji, sur le point de rentrer en éruption. Le Shogun vous charge, braves Samourais, de sauver les parchemins sacrés et plans pour armes magiques qui se cachent à l’intérieur du volcan. Olivier B. termine premier après avoir fait exploser le volcan, devançant, dans cet ordre, le petit Paul, Olivier L. et Mickaël.
Table 5, dite « Wir schaffen das » : F.-R. termina « épuisé », c’est le terme officiel, cette partie de Aeon’s end, qui fut quand même gagnée car ses partenaires, Elouann, Camille et Maïwenn, en ressortirent intacts. Eux aussi, ils y sont arrivés.
Table 6, dite « Oder-Neisse über alles » : dans l’aquarium, Jack, lui aussi de retour, avait déployé les grands oripeaux de The edge: Downfall. De cet exercice de style pour figuriniste (ou se mêlent tous les styles), Michal Oracz a fait un jeu d’escarmouche musclé et violent, où la taille des figurines n’est pas seulement de la décoration mais ancrée au cœur des mécaniques. On sent bien la patte du créateur de Neuroshima Hex, auquel The Edge doit beaucoup, avec des unités qui ne vont pas s’éterniser en jeu et des pouvoirs qui font la différence quand on les utilise. S’y ajoute une gestion des ressources tendue (une mana renouvelable à chaque tour et une à usage unique, mais avec possibilité d’en regagner via des points objectifs) pour obliger à bien réfléchir à ses actions. Mais sa grande force, réside dans la facilité de mise en place. Non seulement les factions sont des « prêts à jouer », mais les scénarios sont en plus conçus pour éliminer tout le superflu. Finis les départs de parties avec chaque joueur sur un bord du plateau : dans The Edge, la partie commence directement dans le feu de l’action ! Mais sa grande force, elle réside dans la facilité de mise en place. Non seulement les factions sont des « prêts à jouer », mais les scénarios sont en plus conçus pour éliminer tout le superflu. Fini les départs de parties avec chaque joueur sur un bord du plateau : dans The Edge, la partie commence directement dans le feu de l’action. Figurines époustouflantes, luttes sans pitié, cohérence des règles, simplification pour aller à l’essentiel de la joute: il fallait un polonais ayant en tête l’histoire tourmentée de son pays pour imaginer un tel déploiement de forces couplé à un tel raffinement. Pourtant, en incarnant les nains, Jack en ressortit défait par Fabrice-alias-Fabrice, qui menait les birades.
Table 7, dite « Format Normandie » : A l’issue de l’assemblée générale, Audrey et Jérôme (encore des revenants) papotaient avec Xel et François. Ils s’apprêtaient à partir, quand Xel et François, qui cherchaient une table à occuper, entamèrent une négociation diplomatique forte et significative pour trouver une solution pacifique au conflit latent qui pointait. Profitant que l’oncle Picsou avait soigneusement rangé toutes les boîtes de jeu dans l’armoire, en ordre alphabétique (il faut cependant parler le coréen pour s’en rendre compte), ils jetèrent leur dévolu sur Paper Tales. Cette initiative fut couronnée de succès, à un jeu qui demande une certaine courbe d’apprentissage pour bâtir la stratégie gagnante. La feuille de score donna Xel 37, Jérôme 35, Audrey 30, François l’ancien 29, mais le plus important dans l’affaire fut bien qu’on joua, tout comme, en 2014, le rôle joué par le couple franco-allemand fit que dans le conflit du Donbass, on discuta.
Table 8, dite « Dévaluation compétitive » : Tristan cherche à se refaire, et croit parvenir à ses fins avec Azul. Avec 83, il en fut proche, mais Olive l’emporte avec 91. Xel, 68, François l’ancien, 57, ont eu l’impression qu’il y avait dans l’air une forme de dévaluation compétitive dans cette affaire de maçons portugais.