Séance de MARDI 23/01/2024 à Servel

La nuit du 23 janvier 1795 vit une bizarrerie de l’histoire militaire quand, dans le cadre des guerres révolutionnaires, un détachement d’un régiment français de cavalerie légère captura (ou du moins neutralisa) une flotte de 14 navires hollandais qui étaient pris dans les glaces du Zuiderzee (profonde juste de 4-5 m cette baie avait gelé au coeur de l’hiver rigoureux -eh oui les jeunes, dans votre monde à +4°C vous ne verrez plus jamais ça-). Commandés par le bien nommé général de Winter, les cavaliers transportant chacun un fantassin (dans une belle symbiose infanterie-cavalerie) s’étaient approchés prudemment et silencieusement des navires et, en position de force pour négocier, obtinrent qu’ils restassent à l’ancre sans participer à la suite des hostilités. Ainsi se conclut cette bataille terrestro-navale sans qu’un coup de feu ne fût tiré -la glace avait figé les vaisseaux dans une position inclinée et leur artillerie était inutilisable-, suite à laquelle la conquête des Provinces-unies fut achevée.

Table 1, dite « Symbioses » : Où l’on retrouve les réguliers du mardi (Xel & François, Mickaël, Marco et VHN) qui explorent Forêt mixte, un jeu aux règles simples où il s’agit de faire les combos les plus efficaces entre ses cartes (des arbres qu’on peut entourer d’habitants de la forêt, animaux, végétaux ou champignons -qui selon l’opinion majoritaire sont bien un règne biologique séparé des deux précédents-). Et il s’agit d’aller vite : si on voit trop grand on risque bien de voir son effort interrompu par la fin de la partie, avec un résultat décevant. Dans la première partie, François et Marco jouent la carte des arbres avec notamment une belle plantation de marronniers qui rapporte 41 PV au premier. Dom pour sa part joue la carte des petits mammifères avec une combo lièvre/renard/fouine qui vaut 62 PV. Avec un total de 87 PV il s’impose devant le sylviculteur à égalité avec Mickaêl avec 69 puis Xel (45) et Marco (43). La seconde partie montre que Marco apprend vite : en jouant sur les chauves-souris et accumulant les feuilles jaunes il s’impose avec 77 PV devant  Dom 71, François 66, Mickaël et Xel 61. Pour finir deux parties de Kites, une gagnée une perdue, un jeu un peu trop frénétique pour la moyenne d’âge des participant.e.s ?

Table 2, dite « Révolutions » : Le mardi n’impressionne pas Gilles, Olive et Marc qui s’attaquent à Eclipse, un jeu ambitieux de développement-conquête-affrontement dans l’espace. En fait ils avaient fini à 1h, presque raisonnable. Selon l’un des protagonistes « Gilles gagne avec 41 PV ; avec la population alien des plantes il a réussi a bien étendre son emprise  sur de nombreux systèmes stellaires. Marc (30 PV) a fait ses petites affaires de son côté de la galaxie avant d’aller mettre une raclée à la base alien centrale. Quant à Olive (20 PV) il a vivoté dans un système a faible population due à une exploration nettement moins profitable et peut-être un manque de velléité combative…. ». Allez, on va encore nous parler de réarmement démographique.

Séance de VENDREDI 05/01/2024 à Servel

Le 5 janvier 1477, Charles le Téméraire, « Grand Duc d’Occident », trouve à 43 ans une mort tragique et solitaire en faisant le siège de Nancy, blessé d’un coup de hallebarde par l’un des Lorrains ou Suisses qu’il combattait. Défait par les Confédérés suisses, Charles le Téméraire s’était retourné contre le jeune duc de Lorraine René II, qui lui a repris la ville. Par une matinée glaciale, aux côtés son demi-frère Antoine, dit le Grand Bâtard, qui lui a toujours été fidèle, mais n’ayant plus avec lui qu’une poignée de soldats, il livre bataille à son ennemi qui bénéficie d’un effectif beaucoup plus nombreux (15 000 contre 2 000), essentiellement de mercenaires suisses. Ses troupes sont taillées en pièces, lui-même disparaît dans la mêlée. Le lendemain, à Nancy où René célèbre son triomphe, un jeune page révèle au duc avoir vu Charles le Téméraire tomber de cheval. René se rend en escorte sur le lieu indiqué et, parmi plusieurs corps dévorés par les loups et que les pillards ont déjà dépouillés de leurs vêtements, on croit reconnaître celui du Téméraire. Son médecin se penche sur le cadavre et l’identifiera formellement d’après une cicatrice à la gorge et une bague restée au doigt.

Charles le Téméraire chute de cheval devant Nancy (miniature des Mémoires de Commynes, XVe siècle)

Quelques années plus tard, à Lannion, on guerroyait sur tous les continents et toutes les époques.

Table 1, dite « Voyage hasardeux » : Une partie d’Iki avec extension pour quatre expérimentés, Mickaël, Axel, Samuel et Dom. La preuve : tous finissent avec les cinq couleurs de personnages dans leur jeu. Le hasard du marché des personnages fait que très peu de bâtiments ont été construits (la maison de thé par Axel). Les incendies n’ont fait aucun dégât. Samuel a fait la course en tête sur la piste d’incendie et a accumulé les points de victoire en cours de partie. Par contre sans jetons tabac ou poissons il marque peu en fin de partie et finit second avec 98 PV. Mickaël fait un dernier achat de poissons à 12 PV qui lui donne la victoire avec 108 PV. Axel et Dom ferment ce tir groupé avec 94 et 93.

Table 2, dite « Fin prématurée » : lorsqu’Elsa von Frühlingfeld présenta son invention au roi Frédéric-Auguste II de Saxe, les gens pensèrent à une supercherie. Cette scientifique du dix-neuvième Box cover of English editionsiècle a utilisé l’uranium, élément récemment isolé, pour chauffer un seau d’eau, et la vapeur générée pour alimenter un moteur, qui lui-même maintenait l’uranium actif via un processus qu’elle appela « atomisation ». Son appareil, le Nucleum, a marqué le début d’une nouvelle ère d’énergie et de prospérité pour les décennies suivantes, et plus prosaïquement pour nous, le jeu dérivé de l’invention éponyme.
Simone Luciani (Tiletum, Tzolk’in, Grand Austria Hotel…) souvent plus développeur qu’auteur, est ici, comme à son habitude accompagné d’un auteur de renom: David Turczi, qui n’est pas non plus n’importe (Teotihuacan, Anachrony…) . Deux auteurs exceptionnels pour un jeu d’exception, jeu que Fred nous présente comme nécessitant un apprentissage au long cours, avouant n’en avoir pas encore maîtrisé les arcanes. Cet aveu d’un si fin connaisseur glace le sang d’Olivier et François, mais il est trop tard pour reculer, et les voilà pris dans l’engrenage. A la découverte, le jeu se révèle d’une grande richesse, avec de faux-semblants de Brass, autre aventure industrielle, moins librement inspirée de la réalité : on construit des rails pour relier des villes, et un réseau à partir duquel on peut agir. Les rails sont en fait des tuiles à double face, l’avers étant constitué d’un couple d’actions associés à une couleur, actions que l’on résout avant de poser son rail, en respectant bien sûr les couleurs. On établit des bâtiments, on fore des mines et on active des centrales, tout l’enjeu étant de réussir à électrifier ses bâtiments en amenant l’uranium par un réseau de rails, ou le charbon pour les nostalgiques. Olivier et Fred jettent leur dévolu sur le matériau rare au sud du plateau, alors que François s’exile au nord, jouxtant une mine de charbon en activité. Ce mouvement calculé à l’instinct l’éloigne du champ de bataille, lui permet de construire à tour de bras et de récolter de précieuses étoiles lors de l’électrification. Il prend rapidement la tête, lentement rejoint par Fred et Olivier qui montent en puissance, mais ce n’est qu’un leurre, car tout se règle à la fin de partie sur la piste des étoiles, qui offre des bonus plantureux à ceux qui s’y sont bien placés. Sentant son avance fondre, sur les coups de minuit, François décide de mettre fin à la partie, au grand dam de ses adversaires, en vidant le marché, coup hautement stratégique qui lui offre une victoire de prestige avec 152 PV, devant Fred, 128, et Olivier, 99.

Attention une précision très importante aux règles (source Luciani lui-même): « Pour pouvoir construire dans une ville, sauf la toute première, il faut un rail À SOI qui relie à la ville en question contrairement à ce qui est écrit sur les règles »

Table 3, dite « Rois sans divertissement » : convoqués à une séance de Gloomhaven : les mâchoires du Lion, François-René, Armand, Jérôme et Olivier B. s’en sortent brillamment.  Ils enchaînent sur Kites, mais leur final est perturbé par l’arrivée intempestive d’un journaliste amateur, puis finissent par s’encanailler au casino des banques centrales avec Q.E. François-René s’y distingue en la jouant super Mario (Draghi bien sûr, pour les intimes).

Table 4, dite « Chronique d’une mort annoncée » : Jérôme et F-R inaugurent Sky Team, un original jeu coopératif à deux où, respectivement pilote et copilote d’un avion de ligne, les joueurs doivent le faire atterrir en utilisant des dés dont la valeur est inconnue de l’autre. Pas mal d’options et de configurations laissent anticiper un jeu riche, mais avec une certaine courbe d’apprentissage : ce soir le 757 s’est crashé avant d’avoir atteint le seuil de piste de l’aéoport de Montréal.

Table 5, dite « Duc d’occident » : à cette table de Civilization (en version 2018), on retrouve Xel, Adrianne, Benjamin et Steven, ce dernier réglant son petit monde avec un panache que n’aurait pas renié le duc d’Occident.

Séance de VENDREDI 22/12/2023 à Servel

Le 22 décembre 1938, l’ornithologue sud-africaine Marjorie Courtenay-Latimer (1907 – 2004) annonça la découverte d’un cœlacanthe vivant, alors que cet ordre était réputé éteint depuis la fin du Crétacé. Elle avait reçu un appel téléphonique lui indiquant qu’un pêcheur actif dans l’estuaire de la Chalumna River venait de remonter dans ses filets un poisson d’un type inconnu. Elle emporta la prise au musée d’East London afin de l’étudier et de l’identifier mais, ne le trouvant dans aucun de ses ouvrages, elle fit naturaliser l’animal et contacta un ichtyologue qui y vit un cœlacanthe, représentant d’un groupe connu alors uniquement à l’état de fossile. L’espèce est depuis baptisée Latimeria chalumnae en l’honneur de l’ornithologue et des eaux où elle a été retrouvée. Il faudra attendre quatorze ans pour qu’un nouveau spécimen soit découvert.

Les cœlacanthes sont peut-être l’exemple le plus fameux de « taxon Lazare » (appellation donnée en référence au personnage ressuscité par Jésus dans le Nouveau Testament). On lit souvent qu’ils ont subsisté des millions d’années sans modification biologique, mais les espèces modernes ne sont en fait pas représentées dans les strates fossiles du Mésozoïque. Cela dit, certaines espèces disparues, particulièrement celles des fossiles de cœlacanthes les plus tardifs, ressemblent beaucoup extérieurement aux modernes. Les fossiles des grands fonds marins sont rarement formés dans les strates où les paléontologues peuvent les mettre au jour, ce qui donne l’illusion que ces espèces des grandes profondeurs n’existaient pas autrefois – hypothèse d’Edward Forbes, toujours à l’étude, et nommée théorie abyssale azoïque.

Le séquençage du génome du cœlacanthe africain en 2013 a mis en évidence qu’il contient environ 25 % d’éléments transposables, qui ont eu un impact faible sur son évolution morphologique, mais fort sur son évolution anatomique afin de s’adapter à ses différents milieux aquatiques, à l’instar de ses cousins tétrapodes qui ont colonisé le milieu terrestre (évolution anatomique par des gènes impliqués dans l’immunité, excrétion d’azote, développement de nageoires et de membres).

Bien des années plus tard, à Lannion, nous accueillions avec plaisir certains de nos plus anciens membres. Le temps n’a pas de prise sur eux, à l’instar des cœlacanthes.

Table 1, dite « Voyage au long cours » : Agités comme des brebis prêtes pour la transhumance, on se bouscule pour s’asseoir à la table de Great Western Trail Nouvelle-Zélande, tout chaud tombé de la hotte. Les élus sont Fred, Mickaël, Olive et Dom. En changeant de continent on a remplacé les vaches par des moutons, ajouté une façon de gagner de l’argent (en tondant les animaux pour vendre leur laine) et remplacé la ligne de chemin de fer par le cabotage dans un archipel. Cette version du jeu semble offrir des voies de développement plus variées et être moins punitif que l’original (ainsi au bout d’un moment on peut ne plus payer de « taxe » sur les tuiles Danger et certains bâtiments adverses). Mickaël met la main sur l’unique bergère, les autres partent sur de la tonte (Fred & Olive) ou de la navigation (Dom). Mais au fil de la partie les priorités changent et au final c’est Dom qui aura le plus de tondeurs. Fred met l’accent sur la construction et la navigation, Dom fait un peu de tout et, riche de cartes faisant tourner son deck, conclut par une belle livraison à Wellington à 13 PV. Ayant aussi grappillé quelques tuiles Bonus et Danger, il l’emporte avec 118 PV devant Fred 86, Mickaël 74 et Olive 51. Maintenant que les règles sont en tête, il faudra refaire un tour aux antipodes.

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Table 2, dite « Fossiles de l’histoire » : bien des années après sa fin, Jeff et Jack en sont à parcourir, pour la première fois sur nos tables, Hitler’s reich, le premier en allemand, le second en soviétique. Malgré une belle victoire de Patton dans le Caucase, les nazis ont triomphé des communistes, et, sur les décombres des fossiles de l’histoire, leurs idées ressuscitent telles Lazare.

Table 3, dite « Taxon inconnu » : sept joueurs en mal de table sont convoqués à une séance de survivalisme avec The thing, qui tourna au carnage. La bête, incarnée au départ par François-René, fit un malheur parmi les humains, contaminant Camille, Élie, Olivier, et abattant froidement François. Xel et Xof, restés seuls représentants de l’espèce, n’ont rien pu faire.

Table 4, dite « Sous la terre comme au ciel » : on retrouve à cette table François-René, Xel, François et Élie, pour la découverte de Kites – une réussite mais avec de mauvaises règles, la faute a un traducteur bénévole, croit-on savoir. Ce n’est pas plus brillant, et même un plongeon historique, à Die Crew avec un triple échec sur la même mission dès le premier pli !